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Réflexions autour du Seiki Soho, une écoute du corps au naturel

Dernière mise à jour : 4 mars




3 mars 2025

 

 

Il m’arrive souvent dans ma pratique du Shiatsu de ne pas appuyer, d’uniquement respirer dans mes mains, à l'écoute du corps et de la respiration du receveur. Cette façon de travailler, on l’appelle communément le « Shiatsu fluidique », mais qu’est-ce que c’est exactement ?  

 

Ma récente lecture du livre de Akinobu Kishi (1949-2012), Seiki la vie en résonance, sous-titré l’art secret du Shiatsu(1), écrit en étroite collaboration avec Alice Whieldon, m’a offert de très enrichissantes pistes de réflexions qui nourrissent déjà ma pratique et mon âme de thérapeute.  

 

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Le quotidien d’un thérapeute est parsemé de doutes et de questionnements. Comment apaiser, soigner, accompagner, aider quelqu’un dans sa souffrance ? Comment obtenir des résultats ? Comment évoluer dans notre pratique ? Ces questions, inévitables, nous font parfois oublier qu’en matière de soin énergétique, nous sommes deux, le receveur et moi. Deux à œuvrer ensemble, dans une étroite proximité où nos respirations communes vont tâcher de s’accorder le plus naturellement et mieux possible.

Le soin est aussi un acte de foi, de confiance réciproque, et la bonne issue d’une séance sera largement déterminée par ce pari pris dès le départ.

 

En Seiki Soho, élaboré par Akinobu Kishi, le praticien a parcouru un chemin intérieur sincère et évolutif pour être, oublier son moi, et pratiquer « moi-et-l’autre comme-un », pour aborder la souffrance de l’autre.

Faire disparaître l’égo, c’est l'une des clés pour « développer un toucher approprié (…) et ainsi être capable de toucher chaque personne de la manière qui lui convient le mieux », explique- t-il.

Faire disparaître l’égo, c’est créer un espace, ou plutôt, le révéler,

car l'espace est présent en permanence, seul notre volonté de bien faire nous en écarte. Cet espace, c’est la matière avec laquelle on soigne, on se connecte - c’est la distance nécessaire pour ne pas envahir le corps de l’autre ou s’y introduire en force.


L'autre clé, c'est remplacer l’intention par l’attention pour habiter sa verticalité ciel-terre et accompagner une personne dans un mieux-être.

L’attention, c’est la possibilité d’une concentration libre, d’une réceptivité naturelle. C'est une forme de prière.

Le soin manuel n’est ni magique ni mystérieux, il trouve sa source au plus proche de nous, dans notre faculté à développer « l’empathie avec la vie », explique Kishi.

C’est, aussi, ne pas s’intéresser uniquement à « l’efficacité médicale du traitement, mais à quelque chose de plus grand », dit le maître du Shiatsu, Masunaga.

 

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Sesshin en japonais, c’est ce qui désigne le diagnostic par le toucher, c’est l’essence du Shiatsu, qui permet de trouver l’empathie avec la vie. Ses mots peuvent faire sourire tant ils paraissent naïfs à un occidental, voire abstraits, ou "new age".

Évidemment, les mots, quand il s'agit de parler de soin du corps, seront toujours en de ça de la sensation puisqu’il est question d’un ressenti, d’une expérience intérieure, laquelle, loin d’être passive, conduit le thérapeute directement à l’espace du corps du patient et l’aide à stimuler sa vitalité embryonnaire . Cela a pour conséquence la guérison ou l'auto-guérison.

C’est cette mise en relation avec les forces de santé de la personne au moyen de mu-shin, (l’absence d’égo), qui permet une amélioration de son état.

L’empathie avec la vie dont nous parlons, qu’est-ce que ça veut dire ?

C’est convoquer tous les sens et le cœur, kokoro en japonais, à travers une pression maintenue, ou un toucher pleine paume.

Observer, respirer, se concentrer, afin d'entrer en résonance.

 

Kishi, élève de Namikoshi puis de Masunaga, après de longues années de pratique du Shiatsu, n’arrivait pas à avoir confiance en ce qu’il faisait : exercer une pression. Délaissant peu à peu le Shiatsu dont il était l’un des praticiens les plus doué au Japon et en Europe, il a développé son propre style, sa façon singulière de traiter les déséquilibres du corps en nourrissant et développant son intuition par le biais d'exercices de purification et en pratiquant la religion Shinto.

Il posait ses mains, avec plus ou moins d’intensité sur les zones du corps et ne travaillait plus par pression, comme ses prédécesseurs illustres. Il se rapprochait, à sa façon, de l'ostéopathie biodynamique.

Il écrit : « Ce que j’ai découvert, c’est que lorsqu’il y a résonance, le Ki (Qi en chinois) entre naturellement. Vous n’avez pas besoin de le provoquer (…) la concentration mentale également se produit naturellement, comme résultat de la résonance ; pour ça non plus vous n’avez pas besoin de forcer (…) La concentration vient naturellement, sans force, là où il y a résonance (…), ce n’est pas une absence de discipline, mais une discipline qui ne résulte pas de la force ».

Il y a dans ces mots de Akinobu Kishi la quintessence de la pensée orientale qui exprime non plus seulement une technique, mais un savoir être, un faire sans volonté, sans intervention intellectuelle ou narcissique.

C’est une disposition de l’esprit et du corps tout à fait passionnante, qui nous place, en tant que praticien, sur un chemin aux possibilités évolutives tout à fait exaltantes.

Apprendre le corps, son anatomie, les méridiens, puis, dans un second temps, oublier, ne plus intervenir volontairement ou mentalement. Recevoir les forces intérieures et extérieures.

 

Plus loin dans le livre, Kishi écrit : « Avec le Shiatsu, vous pouvez exprimer votre personnalité. À cet égard, c’est une sorte de pratique artistique. »

Je tiens beaucoup à cette dimension artistique, moi qui suis très liée à l’art, à la peinture et à la danse particulièrement. Je tiens aussi beaucoup à la possibilité de créer, recréer. Il ne faut pas avoir peur d'explorer et de suivre son intuition. Kishi le dit, il faut être courageux !


Envisager le Shiatsu comme un art du geste ne me paraît pas usurper au vocabulaire de l’esthétique. Corporéité, inspiration, concentration, souffle, sont au cœur de notre pratique avec pour objectif d’accomplir la vie, d’en faire jaillir la nature profonde, la puissante expressivité.


Chaque geste requiert souplesse, délicatesse et précision, des qualités partagées avec quiconque poursuit une quête de sens, dans le but de faire le beau et de s'élever dans l'existence.  
 

Dans le film Perfect day de Wim Wenders, le personnage principal, Hirayama, travaille à l’entretien des toilettes publiques de Tokyo. Il effectue des gestes simples et répétitifs peu valorisés dans notre société. Chaque journée ou presque ressemble à la précédente. Mais ce qui fait la différence, c’est le soin qu’il porte à chacun de ses gestes, c’est son attitude dans la vie. Il donne du sens et du soin à ce que nous considérons comme vulgaire et sale.

Il en devient un être lumineux, à la grandeur naturelle, sans orgueil. Et ce qui apparaît soudain, c’est un homme qui a du kokoro (cœur), un artiste, un poète, une âme noble qui connait le silence qui sait redonner sa gloire aux choses les plus modestes.

On boit chacun de ses gestes, on en redemande, c’est beau et calme comme un tableau de Morandi.

Nature morte, 1955, Giorgio Morandi
Nature morte, 1955, Giorgio Morandi

Il y a beaucoup à dire sur le Seiki Soho, Kishi, et le Shiatsu, et je dois m’interrompre si je ne souhaite pas transformer ce cours article en essai.

J'ai pris plaisir à écrire et à partager ici mes réflexions avec vous, cher lecteur.

Je ne donnerai pas mon texte à corriger aux nouveaux robots intelligents qui nous réservent toutes sortes de chefs-d’œuvre littéraires et artistiques à l’imagination froide, et promettent de résoudre nos problèmes et nos questions. Vive le vide, le doute et les questions sans réponse. Vive la recherche.

À rebours de ce qui attend beaucoup d’humains, c’est moi qui mettrai Chat gpt au chômage, non l’inverse !

 

Les robot ne pourront remplacer la main - ma main qui se pose sur vous lorsque vous en avez besoin. Il est aussi là, le cœur d'un être vivant. 

La main

Douce et chaude quand elle touche

Atteignant chaque niveau, chaque espace

Sachant où elle doit toucher

Sans doute, sans hésitation

Apaisante

Plénitude centrée sur le cœur

Apporte la sensation d’être bercé

Elle permet au Ki du ciel de vous traverser

Éloignant la disharmonie

Re-né grâce au toucher

 

Poème de Kishi


  1. Akinobu Kishi, Alice Whieldon, Seiki la vie en résonance, l'art secret du Shiatsu, Édition Sully, 2015, pour l'édition en langue française



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